A la découverte des sorbiers

Sorbier des oiseleurs, cormier, allier, alisier, tous ces noms français appartiennent à des arbres bien différents mais tous issus du genre Sorbus.

Beau spécimen de cormier (S. domestica)

Les sorbus font partie de la grande famille des rosacées. Environ 2’000 plantes représentent cette famille dans le monde entier. Beaucoup ne sont que de simples herbes telle que la potentille, d’autres sont des arbustes ligneux, comme les églantiers, les framboisiers, et enfin on y trouve également de grands et beaux arbres, pommiers, pruniers, poiriers , etc. la liste est longue.

Revenons à notre genre Sorbus. On rencontre quatre espèces à l’état sauvage dans notre région. Deux espèces présentent un feuillage composé qui se ressemblent fortement, il s’agit du sorbier des oiseleurs (Sorbus aucuparia) et du Cormier (S. domestica). Pour leur part, l’alisier (S. torminalis) et l’allier (S. aria) ont des feuilles simples dentées, bien différentes des deux premières espèces citées.

Le plus répandu, le plus connu est le sorbier des oiseleurs, qui doit son nom au fait que d’août en septembre selon l’altitude, il se couvre d’une multitude de fruits rouge écarlate d’environ 1 cm de diamètre qui font le délice des oiseaux. Les oiseleurs profitaient de l’attrait qu’exerçaient ces fruits sur les grives pour les capturer. C’est bien cette spectaculaire fructification, à laquelle il faut ajouter le feuillage doré d’automne qui fait le succès de cet arbre.

C’est plutôt un montagnard, les plus beaux spécimens sont souvent en moyenne altitude, dans de bonnes conditions, ils peuvent atteindre une quinzaine de mètres de hauteur. Plus haut, ce sorbier devient buissonnant et on le trouve dans cette forme jusqu’à près de 2000

On le rencontre dispersé dans les bois, mais il peut également s’accrocher dans les rochers. Dans le Jura, il est parfois isolé au cœur des pâturages. Pour s’épanouir, il préfère les sols calcaires. Son aspect décoratif lui a valu d’être planté en plaine, dans les parcs, les jardins et également en arbre d’avenue. Les exemples d’alignement que nous pouvons observer en Suisse romande, indiquent clairement que les situations bétonnées et restreintes ne lui réussissent pas. Il n’est pas rare que les sorbiers restent chétifs et qu’ils aient l’air bien malheureux en bordure de route ou autour des parkings.

A l’état sauvage, il est répandu dans toute l’Europe jusqu’en Scandinavie, on le rencontre également en Afrique du Nord et en Asie Mineure. Il fut introduit en Amérique du Nord où il est largement planté.

Les feuilles composées, de 10 à 20 cm de long, portent 13 à 17 folioles dentées sur une grande partie de leur longueur, seule la base est dépourvue de dents.

La floraison a lieu entre mai et juin. Les fleurs blanches à 5 pétales mesurent 1 cm, elles sont groupées en grandes grappes du plus bel effet. Mellifères, elles ne tardent pas à attirer les insectes de tous bords qui assurent ainsi la fécondation.

L’écorce de ce bel arbre est tout d’abord gris clair, avant de devenir plus foncée et d’être marquée de lenticelles. Elle protégera le tronc durant les 100 à 120 ans que ce sorbier peut atteindre. C’est une faible espérance de vie comparée à d’autres arbres.

Le cormier est très proche du sorbier des oiseleurs. Ses feuilles également composées sont un peu plus grandes et comportent 11 à 21 folioles symétriques et dentées uniquement sur les deux tiers supérieurs.

Les fleurs ne présentent que peu de différences, il faudra attendre la formation des fruits pour que l’identification ne laisse plus planer aucun doute. En effet, le cormier produit de magnifiques petits fruits d’environ 3 cm qui ont la forme d’une poire. La face exposée au soleil devient d’un beau rouge alors que l’autre partie reste verte. En vieillissant, ces petites “poires” deviennent blettes, molles et de couleur brune. Ces fruits sont appelés les cormes, ils sont comestibles et peuvent être distillés.

Bien qu’atteignant une taille moyenne, environ 15 m à l’âge adulte, le cormier présente un beau tronc costaud et droit, habillé d’une écorce d’abord grisâtre puis tirant sur le brun et devenant fortement gercée avec l’âge. Car lui, il a le temps de voir venir et de prendre de l’âge, atteignant dans de bonnes conditions 500 à 600 ans.

Arbre de plaine, il ne s’aventurera pas à plus de 700 m dans nos régions. On le rencontre en Europe méridionale, en Afrique du nord et en Asie occidentale. Chez nous, il fut cultivé, on le trouve rarement à l’état subspontané.

Quelque peu oublié, il a failli disparaître de nos régions, ce qui lui a valu d’être sur la liste des plantes à protéger. On rencontre des arbres adultes dans certaines anciennes propriétés. De nombreux jeunes plants ont été plantés ces dernières années mais il faudra encore patienter quelques années avant qu’ils présentent les caractères de l’espèce. Hormis les propriétés privées qui ne peuvent pas être visitées, on peut admirer quelques cormiers à Estavayer-le-Lac, en bordure de la route menant à Grandcourt. Certains passionnés n’hésitent pas à venir de Suisse allemande pour voir ces raretés.

Les photos qui accompagnent ce texte ont été prises dans la région d’Yverdon. Cet arbre est l’un des plus beaux cormiers de Suisse romande, à ma connaissance. Malheureusement, il est attaqué à sa base par un champignon lignivore appelé Ganoderma applanatum, à moyen terme, sa stabilité est compromise et j’ai bien peur qu’une fois, lors d’une visite, je trouve ce vieux cormier couché par un coup de vent rageur. Heureusement, les propriétaires prévenants, ont déjà planté son successeur, ainsi les générations futures pourront également admirer cet arbre et ses étranges petites poires.

Cédric Leuba

PS : les autres espèces de sorbiers ne seront pas oubliées et feront l’objet d’un article ultérieur.

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